Méritons nous tous l’enfer ?

Bonjour,

Quelqu’un sait pourquoi sainte Thérèse d’Avila dit qu’elle mérite l’enfer pour ses propres péchés ?

" lorsqu’un jour, étant en oraison, je me trouvai en un instant, sans savoir de quelle manière, transportée dans l’enfer. Je compris que Dieu voulait me faire voir la place que les démons m’y avaient préparée, et que j’avais méritée par mes péchés."
(sainte Thérèse d’Avila)

Je me demande pourquoi elle mérite l’enfer par ses péchés.

Par le péchés originel je comprend car je me dis que nous sommes similaire à Adam et que nous aurions péchés comme lui, mais là c’est par ses péchés actuel alors qu’il me semble qu’elle désire être sainte depuis l’enfance.
Cela voudrait dire que l’on fait tous des péchés affreux régulièrement. Pourtant nous n’avons pas l’air de nous en rendre compte. Tout ceci est un peu mystérieux pour moi.

Peut-être connaissez vous un début de réponse grâce à l’oeuvre de Maria Valtorta, qui pourrait nous éclaircir sur le fait que nous méritons apparemment tous l’enfer par nos péché actuel ?

@Jean777
Etonnant en effet, mais on retrouve des traces de cette hyper-conscience des péchés dans d'autres grands mystiques :
C'est le cas de Padre Pio chez qui prières et communions provoquaient parfois des larmes qu'il commentait ainsi :

Je pleure mes péchés et les péchés de tous les hommes… 

Quand on se compare à ce saint, on prend la mesure de toute notre imperfection.
Et Gemma Galgani, avant de recevoir les stigmates, eut aussi cette hyper-conscience de ses péchés :

Arrivé au soir, j’ai ressenti une douleur intérieure de mes péchés, plus profonde que toutes celles que j’avais expérimentées auparavant. Après cela, mon âme fut toute envahie d’Esprit Saint. Mon intelligence ne pouvait penser à rien sinon à mes péchés et aux offenses faites à Dieu. La mémoire me les rappelait tous et me faisait voir tous les tourments que Jésus avait souffert pour me sauver, et la volonté me les faisait tous détester et promettre de vouloir tout souffrir pour les expier. Une foule de pensées envahirent mon esprit; pensées de douleur; d’amour, de crainte, d’espoir et de réconfort.

On trouve de même cette hyper conscience chez St François d'Assisse répondant tristement au sultan Al-Kâmil qui lui demandait pourquoi les chrétiens prêchant un Dieu d’amour, faisaient la guerre : 

Sire, l'Amour n'est pas aimé. L'Amour en ce monde est toujours crucifié.

Mais il s'agit ici des péchés des hommes, non des siens, mais on trouvera sans doute dans ses écrits, cette hyper conscience de la Croix.
Maria Valtorta, dans son Autobiographie, raconte comment elle du mener une lutte impitoyable contre ses péchés qui, à côté des miens, ne me semble pourtant que broutilles.
Je pense donc que la grande mystique que fut Thérèse d'Avilla, eut cette hyper-conscience de ses péchés au point de parler d'Enfer.

Je ne sais plus quel saint ou quelle sainte demanda à Dieu de voir son péché comme Lui le voit. 
Ce fut tellement insupportable qu’il ou elle supplia bien vite d’être délivré de cette connaissance.(Était-ce le curé d’Ars?)
De fait, ce n’est que dans la Lumière et l’Amour pur de Dieu qu’on se connaît vraiment, que les illusions, les complicités, les défaussements se révèlent crûment et doucement.
Jésus a été cette Lampe pour tous ceux qui L’ont rencontré. 
Il S’offre à l’être toujours depuis. 
S’engager à Sa suite c’est se découvrir graduellement.
 Cf les « surprises » des apôtres au moment de la Passion de Jésus : ils se découvrent radicalement incapables de L’accompagner malgré leur amitié et leur foi, réelles!

Entrer dans le Mystère, l’Abîme de Lumière-Amour, c’est voir de mieux en mieux combien nous ne le méritions pas, mais plutôt son contraire, et connaître de plus en plus radicalement la Miséricorde exercée envers nous, la gratuité de cet Amour.
Cf la séquence de Pentecôte « sans Ta Puissance divine, il n’est rien, en aucun homme, rien qui ne soit perverti ».

Les saints mystiques ont vécu ce cheminement avec ces épisodes dramatiques des nuits, surtout la nuit de la foi, où l’impasse leur semblait totale, leur condamnation inévitable…
Ce que l’ennemi, le prince félon, le squatteur dépose en nous, y cultive, ce qu’il grossit comme un microscope électronique sophistiqué pour mieux nous affoler, nous perturber, nous désespérer, nous révolter, ce sont réalités spirituelles; infiniment plus subtiles et délicates que nous autres « terreux »!

Dieu est notre Défenseur. Lui pénètre tout, et nous veut, comme autant de fils et filles.

 Jésus exprime, avec Marie L’accompagnant en tout, combien Il est déterminé à nous sauver, à quelles extrémités Il consent pour cela.

Peut-être notre monde occidental entre-t-il dans une de ces  « nuits», prélude à une « résurrection«, cette « nouvelle Pentecôte », cette »civilisation de l’amour ». 
Combat, jugement, choix…Grâce renouvelée et plus accueillie.

Un Père du désert répondait à qui lui demandait un jour de prier pour lui « Je n’aurai pas pitié de toi, et Dieu non plus, tant que tu n’auras pas pitié de toi-même »
Que Bernanos exprimait autrement « s’aimer humblement comme n’importe quel membre souffrant de l’Église »
L’amour en ce monde, de ce fait, a toujours un versant douloureux.
 Porté au mieux par la reconnaissance et la louange du fils qui se sait « prodigue« et pourtant si infiniment aimé.
« Que rendrai-je au Seigneur pour le bien qu’il m’a fait?. .j’élèverai la coupe du salut… »
Nous avons cette grâce, dans notre indignité, de recevoir Jésus et Marie à offrir, pur parfum, Encens « Sacrifice de bonne odeur »…Eux qui nous veulent frères sœurs en leur béatitude « Je veux que là où Je suis, ils soient avec Moi… »Et ceci est déjà accompli en Marie.

@Joële
J'ai beaucoup aimé ta réflexion sur le "pécheur" (et tes autres interventions aussi, sur les autres sujets).
Ce qui m'a le plus frappé, lors de mon retour à Dieu, c'est la Miséricorde, l'Amour infini qui m'a fait pleurer des larmes de reconnaissance, de joie.
Mes premiers contacts avec la "confession" retrouvée (ou sacrement de réconciliation) étaient curieux car je ne connaissais que l'énumération culpabilisante des péchés de ma jeunesse. Et là je ne la retrouvais plus, je ne trouvais rien d'autre  à dire que mon désir profond de me réconcilier avec la plénitude de l'Amour que je savais avoir offensé. 
C'était un besoin physique autant que spirituel et mon confesseur, quand je lui demandait le pardon de Dieu pour la somme de mes fautes et de mes manquements, me répondait invariablement : "Tu es déjà pardonné", me provoquant un débordement de reconnaissance.
Au fil du temps, j'ai perdu ce don des larmes, mais ta méditation m'en a renvoyé l'écho.

Merci @François-Michel! Joie de raviver un peu cette « connaissance«